Les abysses de River Solomon

Les abysses est le second roman de Rivers Solomon paru en France chez les éditions Aux forges de Vulcain. Dans la postface du roman, les origines de celui-ci sont précisés. Rivers Solomon s’est inspiré d’un groupe de musique Drexciya qui a inventé l’idée d’une civilisation sous-marine dans une légende afrofuturiste, idée reprise en 2017 par le groupe Clipping dans le titre « The Deep ». Histoire un peu particulière pour un roman qui ne l’est pas moins et qui peut être classé dans le réalisme magique, ou dans la fantasy selon les idées développées.

Dans Les abysses, Rivers Solomon a imaginé un peuple dénommé les Wajinrus, vivant au plus profond des océans. Ces Wajinrus ont une longue et triste histoire. Ils sont les descendants des femmes noires jetées à la mer par les esclavagistes lors du commerce triangulaire des esclaves parce qu’elles étaient enceinte. Cela a donné naissance à la civilisation des Wajinrus, sorte de sirènes, peuple mi-humain mi-poisson.

Dès le début du roman, on fait connaissance de Yetu, une Wajinru au statut particulier. En effet, elle est l’historienne de son peuple, sa fonction est de garder en elle les souvenirs de son peuple et de les transmettre. Ainsi, les membres de son peuple lui transfèrent leurs souvenirs et une fois par cycle, lors d’une cérémonie, elle va leur rendre, leur transmettre afin qu’ils se souviennent de leur passé, de leurs origines. Son rôle est essentiel mais extrêmement difficile à supporter pour elle, et ces souvenirs lui font peu à peu perdre pied au point de vouloir fuir son monde.

Au travers du récit de Yetu, le lecteur prend connaissance de cette civilisation des abysses, de son fonctionnement et de ses particularités, de ses croyances. Toutefois, le roman suit surtout le personnage de Yetu et j’avoue que j’aurai aimé en apprendre plus sur les Wajinrus, le roman ayant un goût de trop peu par moments. Il en est de même sur les origines de ce peuple qui est évoqué assez brièvement. Le passé de ce peuple est terrifiant, il est un des thèmes principaux du roman et il hante leur présent. Il est mis en abyme par la rencontre de Yetu avec le monde des deux-jambes, monde nouveau pour elle qui va comprendre que l’on n’échappe pas à son histoire, à son passé.

L’écriture de Rivers Solomon est très évocatrice et la traduction fait bien ressortir cet aspect. Le roman se lit vite, trop peut-être. Le monde créé aurait sans doute mérité un plus long traitement pour être plus immersif, pour que l’on s’attache plus aux personnages. Surtout que les passages dans l’océan sont vraiment superbes, décrivant un monde totalement à part mais si proche. Les thématiques sont nombreuses: racisme, histoire, mémoire d’un peuple, notion de genres. Cependant, elles pâtissent elles aussi de la brièveté du roman.

Les abysses est ainsi une belle lecture qui parle avec justesse de thématiques difficiles. L’univers proposé est fascinant, l’écriture belle et imagée. Cependant, le roman a un goût de trop peu par moments et aurait mérité d’être un peu étoffé.

Autres avis: Boudicca, Elhyandra , Les Chroniques du Chroniqueur, Just a word, Post Tenebras Lire, Elbakin,

Auteur: Rivers Solomon

Éditeur : Aux forges de Vulcain

Parution:11/09/2020

Lors du commerce triangulaire des esclaves, quand une femme tombait enceinte sur un vaisseau négrier, elle était jetée à la mer. Mais en fait, toutes ces femmes ne mouraient pas. Certaines ont survécu, se sont transformées en sirènes et ont oublié cette histoire traumatique. Un jour, l’une d’entre elles, Yetu, va le leur rappeler, dans ce roman d’émancipation, magique et réflexif, sur la condition noire et sur l’impossibilité d’une justice, en l’absence de vérité.

Cette chronique fait partie du Défi Cortex:lieu souterrain ou sous-marin

16 commentaires

  1. Nous sommes encore une fois sur la même longueur d’ondes : je l’ai aussi trouvé trop court et c’est, je pense, ce qui m’a empechée de vraiment m’immerger dans l’univers et de m’attacher au personnage principal. Pourtant les thématiques traitées me plaisent beaucoup !

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