Le dernier rayon du soleil-Guy Gavriel Kay

alire95-2005Quelque part au nord, dans des contrées sauvages au climat extrême, trois civilisations sont parvenues à un tournant de leur histoire.
A bord de leurs vaisseaux-dragons, les Erlings mènent des raids sanguinaires contre les Anglcyns, contraints de s’allier avec leurs ennemis de toujours, les Cyngaëls, pour repousser les envahisseurs. Mais le vent du changement souffle sur ces terres hostiles où rien ne pousse. Thorkell le Rouge, Aëldred et Alun, les chefs de ces trois peuples que tout oppose, vont bientôt réaliser que leur survie dépend les uns des autres, tant leurs destins sont désormais étroitement liés.
Malgré la présence bienveillante des fées de l’entremonde, est-on arrivé au dernier rayon du soleil ?

 

Auteur: Guy Gavriel Kay

Traduit par : Elisabeth VONARBURG

Éditions: Le Pré aux Clercs

Parution: 2006

L’auteur: Guy Gavriel Kay est un écrivain canadien spécialisé dans la fantasy historique. En 1974, alors qu’il est étudiant en philosophie à l’Université du Manitoba, il est engagé par Christopher Tolkien pour l’assister dans son travail sur le Silmarillion. Ses romans ont en commun de se situer dans un monde imaginaire, mais s’inspirant très fortement de l’Histoire.

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Ce roman est le premier roman de Guy Gavriel Kay que je lis mais surement pas le dernier. J’avais été découragée par la taille de ses romans, souvent de gros pavés mais le thème de celui-ci m’attirait fortement. Le roman parle des conflits entre Vikings, Celtes et Anglais dans la seconde partie du IX ème siècle, partie de l’histoire qui m’intéresse beaucoup.

Le dernier rayon du soleil se situe dans le même univers que Les lions d’Al-Rassan, pays auquel le roman fait parfois référence. Le roman se situe dans le registre de la fantasy historique et revisite les civilisations nordiques à une époque ressemblant fortement à notre IX ème siècle. Le roman s’intéresse à 3 civilisations: sous la plume de l’auteur, les vikings deviennent les Erlings, les celtes gallois deviennent les Cyngaëls et les Anglo-Saxons deviennent les Anglcyns. On retrouve également parmi les personnages, Aëldred le roi des Anglcyns qui fait référence au roi Alfred le Grand, roi du Wessex (l’un des principaux royaumes de l’Angleterre anglo-saxonne) de 871 à sa mort en 899.

Dans ce contexte difficile, Guy Gavriel Kay va nous raconter les destins de plusieurs personnages de chaque contrée: 2 frères Cyngaëls croisant la route du vainqueur de Siggur  » le volgan », célèbre Erling ayant fait de nombreux raids dans leur pays, Thorkell le Rouge et son fils Bern, le roi Aëldred et ses enfants. L’auteur prend le temps de décrire chacun des personnages et le pays où il vit, afin d’expliquer la situation entre ces 3 peuples, situation loin d’être simple. Ce qui est admirable, c’est qu’il n’y a aucun manichéisme dans le récit, chaque peuple a ses coutumes propres qui peuvent paraître étranges ou cruelles aux autres mais il n’y a aucun parti pris. Les personnages ont tous un caractère détaillé, ce qui les rend attachants. Ils constituent le gros point fort de ce roman pour moi, car c’est un des points que j’affectionne le plus dans un roman.

Un autre point fort du livre est l’aspect très détaillé du contexte historique. Tout en étant dans un univers de fantasy, le socle historique est très documenté et très riche. Le style de l’auteur change en fonction des 3 peuples et nous offre ainsi une vision globale de la situation des civilisations nordiques à cette époque. Cet aspect permet de très bien comprendre l’état des choses même si on a peu de connaissances sur la période. Un détail que j’ai beaucoup apprécié par exemple, est la présence au début du roman d’un marchand venant d’Al-Rassan et s’appelant Ibn Bakir qui raconte les détails du rituel des décès chez les vikings. Or, il se trouve qu’un tel document a été retrouvé historiquement et fait partie des rares documents écrits que l’on ait sur la civilisation viking. Par contre, l’auteur a un peu trop de recours à l’aigle de sang, supplice qui n’a pas été avéré historiquement. Mais c’est un détail, tant le reste est bien retranscris.

Un passage du roman reflète bien la difficulté de cette période et de la retranscription historique: « L’histoire du raid du Volgan, avec sa poignée d’hommes, sur un sanctuaire des Veilleurs en Ferrières sera narrée de façon très différente par un prêtre survivant à l’attaque, dans la chronique d’une année funeste, et par un skalde erling célébrant un triomphe. » Le problème pour comprendre les coutumes des peuples du Nord est bien souvent que leur histoire est racontée par ceux qui ont subi leurs attaques, et on imagine sans mal leur façon de la raconter.

Le seul élément surnaturel dans le récit est la présence de l’entremonde, c’est à dire le monde des fées. Les fées sont un élément souvent présent dans les légendes celtiques mais ce ne sont pas les gentilles fées de Disney. Elles ont des sentiments différents des humains et une reine, et vivent dans un monde qui n’est pas vraiment le notre. Seules quelques personnes peuvent les voir. La présence de cet entremonde est importante mais pas prépondérante. Cela donne au roman un coté poétique et s’intègre très bien au contexte de cette période.

Le rythme du roman est plutôt lent mais certains passages sont très intenses. On sent très bien cette tension dans l’atmosphère particulière qui s’instaure entre les personnages que tout oppose au départ. Certains passages sont vraiment touchants alors que d’autres sont violents. L’écriture fluide et souvent poétique de l’auteur permet d’entrer très vite dans l’histoire et de se prendre au récit. La fin du roman offre de grands moments d’émotion avec un duel d’une grande beauté.

J’ai vraiment beaucoup apprécié la lecture de ce roman de l’auteur dont je compte bien lire d’autres romans. Des personnages vraiment approfondis, un contexte historique très documenté et une écriture juste et belle sont les principales qualités de ce très beau roman. Il n’est malheureusement plus édité en France mais on peut le trouver en occasion.

Célindanaé

Autres avis: Boudicca, Elbakin

rayonsoleil

Cette chronique fait partie du

challenge littérature de l’imaginaire

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20 commentaires

  1. Ton avis est très intéressant, parce qu’il apporte un contrepoint bienvenu à certains de ceux que l’on peut trouver sur le net, et qui en font un des moins bons romans de Kay. Je vais donc me fier à ta bonne impression et essayer de me le procurer. Merci pour ta critique 🙂

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    • Comme dit, c’est le premier de l’auteur que je lisais (mais pas le dernier), la thématique des conflits entre les peuples du Nord m’intéresse beaucoup et je la trouve brillamment traitée dans ce roman. J’ai lu d’autres avis et c’est un peu contrasté mais il a de bons avis sur Le Bélial, Elbakin et par Boudicca aussi :). Il n’y a pas beaucoup de romans sur le sujet et celui-ci vaut le coup.

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  2. IL s’agit d’un Kay que j’ai repéré depuis que j’ai gouté à l’auteur. Je crois qu’un niveau moyen de Kay reste au-dessus du lot toute production de fantasy.

    Tu soulignes dans ta critique les points forts et la marque de fabrique de Kay. Des 3 romans lus cette année, ce sont le caractére historique développé, les personnages très soignés, la fidélité à l’histoire et un nombre de pages élevés.

    Pour ma part, je vais continuer aussi à suivre le bonhomme, avec déjà celui-ci. Je me suis procurée La tapisserie!

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