Je suis le sang-Ludovic Lamarque et Pierre Portrait

Londres, 1888.

Au théâtre du Lyceum, la pièce Jekyll & Hyde fascine la bonne société victorienne tandis qu’une série de meurtres est commis dans l’East End. Des prostituées sont sauvagement assassinées. Bram Stoker, écrivain et régisseur du Lyceum, voit dans ces meurtres atroces la matière pour écrire le grand roman qui lui vaudra la postérité. En visitant les lieux du crime, il rencontre Mary Kelly, une prostituée irlandaise, et l’assassin que la presse surnomme bientôt : Jack l’Éventreur.

Deux romanciers, le Bordelais Ludovic Lamarque et le Parisien Pierre Portrait, nous projettent en plein dans les sanglantes années 1880, lorsque l’affaire Jack l’Éventreur terrorisait la capitale britannique et tandis que le mythe de Dracula trouvait sa naissance…Un thriller victorien méticuleusement documenté mais qui, comme l’aurait dit Alexandre Dumas, « viole l’histoire à condition de lui faire de beaux enfants ».

Les moutons électriques         avril 2016

Auteurs :Ludovic Lamarque et Pierre Portrait

Genre: thriller victorien

Mon avis:

Ce livre m’a intéressé dès que j’en ai entendu parler sur Babelio pour l’opération Mass critique sur l’imaginaire. Je ne l’ai pas gagné mais je n’ai pas résisté longtemps et je l’ai acheté dans la foulée. J’ai même interrompu mon programme de lecture pré Imaginales pour le lire surtout après en avoir lu d’excellentes critiques de la part du Bibliocosme et d’Aelinel. Ce roman avait tout pour me plaire: le thème, l’époque victorienne que j’aime beaucoup et un hommage à Dracula de Bram Stocker. J’ai lu Dracula il y a pas mal d’années et j’avais beaucoup aimé l’ambiance particulière de ce roman. J’ai lu beaucoup de romans fantastiques de cette époque dont Carmilla de Joseph Sheridan le Fanu dont on parle à plusieurs reprises dans Je suis le sang.

Et bien entendu, j’ai beaucoup aimé ce roman. L’idée de base est excellente et originale. Le livre est extrêmement bien documenté et le procédé de mise en abime de l’écriture est très intéressant. En plus, cela m’a permis d’apprendre pas mal de choses sur la vie à Londres à cette  période et sur l’énigme encore actuelle de Jack l’éventreur. J’ai aussi retrouvé beaucoup de l’ambiance du film From hell dans ce roman. Lors de la lecture de certaines scènes, des images de ce film me sont venues de suite à l’esprit et les descriptions des conditions de vie dans l’East End. On y retrouve également beaucoup de points communs dans l’enquête sur Jack l’éventreur et sur ses victimes.

L’action du roman se situe donc en 1888, l’année des tristement célèbres meurtres de Jack l’éventreur. Le personnage principal du livre est Bram Stocker, alors régisseur du théâtre Lyceum (ce qu’il a réellement été en 1876). La publication de Dracula aura lieu en 1897. Une pièce de théâtre sur docteur Jekill et Mr Hyde se joue au tout début de l’histoire. Le roman est bluffant de réalisme tellement il est bien documenté sur le contexte de l’époque et sur la ville de Londres et les conditions de vie des quartiers pauvres, sur la vie de Bram Stocker et sur les meurtres de Jack l’éventreur. On se croirait à certains moments dans une enquête policière et le côté thriller est très prenant.

Deux histoires sont mises en parallèle: les crimes de Jack l’éventreur et la création du roman Dracula. On assiste à la création du futur roman Dracula et l’analyse du processus créatif et des recherches nécessaires à un roman est très intéressante. On voit de quoi Bram Stocker a pu s’inspirer, comment des rencontres ou des lieux peuvent inspirer un  écrivain.

Le roman se lit très bien, il n’y a pas de baisse de rythme ni de longueurs. L’écriture est presque clinique par moments décrivant bien l’horreur des conditions de vie des bas quartiers à cette époque et des crimes de Jack. L’impression de vérité qui ressort du roman est encore renforcée par la présence d’écrivains célèbres de l’époque comme Oscar Wilde et Thomas Hall Caine.

Les personnages secondaires sont également intéressants. J’ai trouvé le personnage de Mary Kelly, la dernière victime du tueur très bien travaillé. Elle inspire le personnage de Mina à Bram Stocker. On sait peu de choses sur elle dans la réalité et les auteurs lui ont prêté un fort caractère et brodé un passé ainsi qu’une liaison avec l’écrivain. Je l’ai trouvé touchante dans sa relation avec Bram Stocker et dans sa relation avec le roman et dans la jalousie qu’elle peut éprouver par rapport à celui-ci. Le personnage du tueur apparait comme froid, calculateur, abject et extrêmement violent narguant la police et aussi l’écrivain. Cela renforce aussi l’impression de réalisme de ce roman car Jack l’éventreur a réellement défier les forces de l’ordre en leur envoyant des messages sur les lieux de ses crimes. Il inspire le personnage de Dracula à l’écrivain avec bien entendu Vlad Tepes. La relation entre Stocker et le tueur est assez sombre et un peu malsaine. Ils se servent l’un de l’autre pour arriver à leurs fins même si Stocker ne le veut pas vraiment et il est un peu passif par moments. La fin du roman est un peu trop rapide à mon goût mais ça ne gâche pas tout le bien que je pense de ce roman.

Le livre donne également envie de lire ou relire Dracula et les autres romans de cette époque. Il se lit presque comme un documentaire sur l’époque et la vie dans une grande ville ainsi que sur le procédé créatif qui entoure la genèse d’un roman. J’ai vraiment beaucoup aimé ce roman et je le conseille vivement surtout si vous aimez l’époque victorienne.

Note: 8.5/10

Célindanaé

ps : je ne saurai que trop recommander le visionnage de la série PennyDreadfull, qui mixe de manière astucieuse les oeuvres de Shelley, Stocker, Wilde, et les principaux mythes connus. Très bien interprété par Timothy Dalton et Eva Green (que je n’apprécie pas trop d’habitude et qui est réellement excellente dans cette série).

Remarque : pour un peu plus de légèreté, je voulais signaler 3 excellents jeux inspirés +/- librement de l’épisode Jack :

  • Mr Jack, jeu de « cache cache » à 2 joueurs où il faut bien se creuser la tête, un joueur incarnant le vil Jack essayant de quitter le quartier de Whitechapel, et l’autre l’enqueteur qui cherche à coincer Jack, en éliminant petit à petit les suspects. Le « mètre étalon » du jeu de société moderne à 2 joueurs.
  • Mr Jack Pocket, variante du précédent, tenant dans la poche et sur une tablette SNCF, et proposant un défi encore plus corsé que le précédent.
  • 1888, jeu d’enquête, d’aventure coopératif dans lequel l’immersion est très forte. Assez exigeant car le démarrage est un peu compliqué, mais ensuite très sympa à jouer.

Et pour finir, je conseille aussi les livres de backround pour l’appel de Cthulhu « 1890 », très documentés et qui ouvrent le champ des possibles pour l’appel de Cthulhu.

Lhotseshar

 

Autre avis: Boudicca, Lune, Aelinel

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